Equivalences de diplômes : régularisation d'inscription
Les faits
Melle K. a obtenu son baccalauréat en Moldavie et a sollicité une équivalence auprès de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Elle interpelle le Médiateur car elle ne comprend pas pourquoi elle ne peut avoir accès aux études de droit organisées dans l’enseignement universitaire ; études auxquelles, par ailleurs, elle aurait eu accès dans son pays si elle y avait poursuivi ses études.
La situation est urgente car elle doit régulariser au plus vite son inscription auprès de l’Université; inscription nécessaire pour passer les épreuves en janvier. Or, la décision obtenue ne lui donne pas accès aux études qu’elle poursuit et nous sommes début janvier.
L’intervention du Médiateur
La décision ne reprenant pas de motivation suffisante pour que Melle K. puisse comprendre ce qui a amené l’Administration à émettre cet avis, le Médiateur interpelle le service des équivalences.
Le Médiateur se demande si la décision est prise sur base du fait qu’il existe deux procédures d’admission dans un établissement d’enseignement supérieur en Moldavie. Dans le cas où il postule dans le système boursier en vue d’obtenir des études gratuites, l’étudiant doit alors passer un examen d’admission organisé par la Faculté choisie. Dans le cas où il opte pour les études payantes (plus de 80 % des étudiants font d’ailleurs ce choix), aucune condition n’est alors demandée.
Tous les étudiants titulaires du baccalauréat ou diplôme de fin d’études secondaires peuvent accéder à l’enseignement supérieur en s’acquittant de droits de scolarité, et ce sans aucune sélection. Si la décision émise est basée sur ces éléments, l’étudiante avait bel et bien accès sans condition aux études de droit dans le pays d’obtention du diplôme puisqu’il lui suffisait de payer des droits de scolarité pour y accéder. Elle n’était nullement
dans l’obligation de passer par une bourse.
De plus, si l’on considère que faire des études à l’étranger a un certain coût et qu’elle devait notamment payer son minerval en Fédération Wallonie-Bruxelles pour accéder aux études de droit, elle se retrouvait dans une même situation ici que dans son pays et aurait eu largement de quoi se payer les frais de scolarité dans son pays.
Le service des équivalences fait part que la décision est basée sur la législation. Les dispositions réglementaires qui servent de base lors de la délivrance d’une équivalence sont celles de l’arrêté royal du 20 juillet 1971 déterminant les conditions et la procédure d’octroi de l’équivalence des diplômes et certificats d’études étrangers.
Cet arrêté s'applique quel que soit le type d'études que l'étudiant étranger désire poursuivre en Fédération Wallonie-Bruxelles. Il fixe les deux conditions primordiales à respecter lors de toute analyse d’un dossier d’équivalence, à savoir : « Art.1er. En aucun cas, l’octroi des équivalences
prévues à l’article 1er de la loi du 19 mars 1971 ne peut avoir comme résultat : a) de reconnaître des études dont le niveau de formation n’est pas au moins égal à celui des études belges équivalentes ; b) de donner à l’impétrant accès à des études qui ne lui sont pas accessibles dans le pays où le diplôme ou certificat a été délivré.Toutefois, le littera b n’est pas d’application pour les titres délivrés dans un Etat membre de l’Union européenne.»
L’Administration se justifie par le fait qu’un système où l'admission effective aux études supérieures est majoritairement soumise à conditions, il convient de distinguer le droit d'accès théorique aux études supérieures octroyé par la possession du diplôme de fin d'études secondaires de l'admission effective d'un étudiant qui, elle, est soumise à conditions. Ainsi, en vue de respecter le littera b) de l’article 1er de l'Arrêté royal du 20 juillet 1971 susmentionné, le bachelier doit apporter la preuve d'admission effective aux études de type long correspondantes à celles qu'il souhaite fréquenter en Fédération Wallonie-Bruxelles. Dans ce cas, l'équivalence est étendue pour ouvrir à cet étudiant les mêmes accès en Fédération Wallonie-Bruxelles. Le Service des équivalences exige donc que l’étudiante fournisse cette preuve d’admission effective afin que le domaine des sciences juridiques lui soit ouvert.
Vu l’urgence de sa régularisation d’inscription, Melle K. fournit un scan de l’Ambassade de Moldavie qui confirme que le baccalauréat de la jeune fille donne automatiquement accès aux études universitaires.
L’original a été envoyé au service des équivalences par voie postale comme l’exige celui-ci. Cependant, ce document n’émanant pas d’une Université où elle aurait été admise ou encore où elle aurait obtenu une attestation d’admissibilité, il est jugé insuffisant pour modifier la décision de la jeune fille.
Le service des équivalences fait part au Médiateur que la décision ne serait pas modifiée pour cette année. Il informe également le Médiateur qu’une réflexion doit avoir lieu à propos des équivalences n’octroyant que le type court pour les ressortissants de pays non-européens n’ayant pas de preuve d’inscription dans l’enseignement supérieur dans leur pays. Toutefois, cette réflexion doit se faire en concertation avec toute la hiérarchie et prendra un certain temps. Le service des équivalences précise toutefois qu’il ne peut donc prévoir quelle en sera l’issue ni dans quel délai une décision sera prise à l’avenir pour ce type de demande.
Le Médiateur attire l’attention sur le fait que dans le cas de la Moldavie, d’une part on ne peut dire qu’il s’agit d’un système où l’admission effective aux études supérieures est majoritairement soumise à conditions puisque ce n’est absolument pas le cas.
D’autre part, le Médiateur revient sur le fait que la circulaire relative aux équivalences de diplômes, stipule pour l’accès aux études supérieures :
« Pour les ressortissants d’un pays qui n’est pas membre de l’Union européenne : Preuve éventuelle de l’admission effective sans condition ou de la réussite d’une ou de plusieurs années d’études dans une école supérieure ou une faculté universitaire dans le pays où les études secondaires ont été terminées ».
En effet, le Médiateur a déjà attiré l’attention à plusieurs reprises sur cette phrase et le terme « éventuelle » repris dans celle-ci. Une preuve éventuelle n’implique aucune obligation de joindre ladite preuve et encore moins d’obligation d’en détenir une pour accéder aux études supérieures. Qui plus est, si l’Administration estime qu’il y a lieu de distinguer l’accès théorique à l’accès effectif, le Médiateur estime que cela devrait être applicable dans les pays où il y a réellement des accès cadenassés par des conditions (examens d’entrée, accès sur base de dossiers, conditions d’accès sur base de la filière du bac, … ) et non dans les pays où les accès sont automatiques, et ce sans aucune condition. Dans les pays comme la Moldavie où le représentant diplomatique, à savoir l’Ambassade, doit fournir un document justifiant de l’accès de l’intéressé sans condition puisqu’il s’agit de la pratique officielle du pays, cet accès effectif, n’a plus de sens.
L’issue de la médiation
Le service des équivalences a confirmé qu’il ne changerait pas de position. Tant que la réflexion générale n’a pas eu lieu, il continue d’exiger la preuve effective d’admission dans l’enseignement supérieur pour ouvrir l’accès aux études supérieures du même domaine d’études en Fédération Wallonie-Bruxelles.
L’Administration n’accepte donc pas l’attestation de l’Ambassade fournie comme preuve d’admission. Elle estime qu’octroyer une équivalence de type long sur la base de ce document viendrait à l’encontre du principe d’égalité qu’elle doit d’appliquer entre tous les requérants.
Une réflexion semble avoir été lancée depuis par rapport à la pratique relative aux accès octroyés aux étudiants non-européens, mais le Médiateur n’a toujours eu aucun retour.
La jeune fille s’est vue refuser son inscription à l’Université et il était trop tard pour s’inscrire à l’épreuve du Diplôme d'Aptitude à accéder à l'Enseignement supérieur (DAES) oganisée par le jury de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui aurait pu être une solution pour régulariser sa situation.
Photo d'illustration - ©daviddannevoye
Attention : chaque cas évoqué ne peut pas nécessairement être généralisé à d’autres situations. En effet, quand il traite une réclamation, le Médiateur examine la situation concrète et prend en compte les arguments invoqués et les pièces probantes apportées.