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Pas d'allocations d'études à cause de la composition de ménage

Les faits

Mademoiselle A. s’adresse pour la première fois au Médiateur au sujet de sa demande de bourse 2022-2023.
Cette dernière est dans un premier temps refusée au motif qu’elle a été introduite pour un étudiant ne figurant pas sur sa composition de ménage, ce qui ne correspond pas au dossier.

Après réclamation, le refus a été maintenu mais le motif est différent et lié au fait que l’intéressée ne dispose pas de composition de ménage établie en Belgique ou document analogue.

Mademoiselle A. est ressortissante française et réside en Belgique sans y être domiciliée.

L’intervention du Médiateur et issue de la médiation

Suite à l’intervention du Médiateur et la production d’un document analogue à la composition de ménage rédigé par sa Mairie, le dossier de l’intéressée sera revu positivement.

Quelques mois plus tard et alors que la campagne de bourse 2023-2024 a débuté, Mademoiselle A. revient vers le Médiateur car sa demande à été refusée au motif qu’elle-même ou les personnes qui pourvoient à son entretien n’ont pas de lien de travail avec la Belgique. Sa mère est ressortissante française et n’a en effet jamais travaillé en Belgique mais en France.

Peu de temps après, l’intéressée apprend que la bourse 2022-2023 obtenue suite à l’intervention du Médiateur doit être remboursée car elle n’y avait pas droit en l’absence de lien de travail en Belgique.

Courant 2023, une vingtaine d’autres dossiers de ce type ont été portés à la connaissance du Médiateur. Il s’agit à chaque fois de ressortissants de l’Union Européenne pour lesquels il n’y a pas de lien de travail avec la Belgique et qui ont pour la plupart déjà perçu une bourse précédemment sans que leur situation ou la réglementation n’ait changé.

De nombreux échanges ont alors lieu avec l’Administration qui justifie ce changement de position en invoquant les conditions supplémentaires que la France (d’où vient la plupart des allocataires européens qui étudient en Belgique) impose aux étudiants européens. Ceux-ci doivent justifier d’une année de présence sur le territoire français ou avoir occupé un emploi en France. La Direction des Allocations d’Etudes considère dès lors qu’elle peut faire de même en vertu du principe de réciprocité sans aucune base réglementaire et peut même réclamer des sommes accordées lors
d’une campagne de bourse antérieure.

Cette situation inextricable pousse le Médiateur à s’adresser au Cabinet de la Ministre de l’Enseignement supérieur.

En 2008, le Médiateur avait interpelé Madame SIMONET, Ministre en charge des allocations d'études, quant à la nécessité d'accorder une bourse d'études aux étudiants ressortissants de l'Union européenne qui se sont installés légalement et durablement en Belgique, même si ni eux-mêmes ni leurs parents n'y avaient jamais exercé d'activité professionnelle.

Avait alors été invoquée la Cour de Justice européenne qui s'est prononcée en la matière le 15 mars 2005 dans le cadre de l'arrêt BIDAR du nom d'un étudiant français qui, suivant les cours en Angleterre, et après s'y être intégré de manière tout à fait conforme, s'est vu refuser le prêt d'études accordé à d'autres étudiants se trouvant dans des conditions semblables. Cet arrêt dispose que tout étudiant doit pouvoir bénéficier des aides octroyées aux ressortissants d'un Etat sur son territoire, pour autant qu'il fasse preuve de son intégration, condition indispensable pour que l'aide ne devienne pas une charge déraisonnable qui pourrait avoir des conséquences sur le niveau global de l'aide pouvant être octroyée par l'Etat considéré.

Cette jurisprudence a fait évoluer le droit communautaire puisque la Cour a constaté qu'une aide accordée aux étudiants séjournant légalement dans un Etat membre, que ce soit sous la forme d'un prêt subventionné ou d'une bourse, et visant à couvrir ses frais d'entretien, entre désormais dans le champ d'application du traité sur l'Union Européenne qui a introduit la citoyenneté de l'Union et a ajouté un chapitre consacré notamment à l'éducation et à la formation professionnelle.

Aussi, cette condition de travail en Belgique a été supprimée et il a été exigé un lien de travail au sein de l'Union Européenne. Le Médiateur peine à comprendre pourquoi cette condition de travail est de nouveau exigée près de 15 ans plus tard et comment la justifier auprès de familles qui en ont bénéficié auparavant sans que leur situation n’ait changé. Cette pratique semble en contradiction avec le principe de libre circulation des travailleurs au sein de l’Union Européenne.

A ce moment, cette problématique n’est toujours pas solutionnée, le Cabinet de la Ministre ne sachant pas nous répondre et attend un retour de son Administration.


Photo d'illustration - ©daviddannevoye

Attention : chaque cas évoqué ne peut pas nécessairement être généralisé à d’autres situations. En effet, quand il traite une réclamation, le Médiateur examine la situation concrète et prend en compte les arguments invoqués et les pièces probantes apportées.